Les pratiques innovantes en agroforesterie pour lutter contre l’érosion des sols en terrains pentus

Comprendre l’érosion des sols en terrains pentus : un défi pour l’agriculture durable

L’érosion des sols constitue l’une des principales menaces pour la durabilité des systèmes agricoles, en particulier dans les zones de terrain en pente. Le ruissellement de l’eau de pluie entraîne la couche superficielle du sol — riche en matières organiques et en nutriments — ce qui impacte la fertilité, altère les rendements agricoles et peut entraîner des glissements de terrain. Cette problématique devient cruciale dans un contexte de changement climatique, où les phénomènes météorologiques extrêmes sont de plus en plus fréquents.

Face à ces enjeux, l’agroforesterie offre des solutions pertinentes et écologiquement durables. Grâce à l’association d’arbres, d’arbustes et de cultures annuelles sur une même parcelle, les pratiques agroforestières permettent non seulement de réduire significativement l’érosion en pente, mais aussi de restaurer les sols dégradés tout en améliorant la productivité agricole.

Les principes de l’agroforesterie appliqués aux terrains pentus

L’agroforesterie repose sur un principe simple : imiter les interactions naturelles et la biodiversité d’un écosystème forestier. En zones pentues, cela se traduit par l’introduction stratégique de végétation ligneuse en complément des cultures classiques.

Ces systèmes présentent plusieurs avantages :

• Les racines des arbres et des arbustes stabilisent la structure du sol et limitent l’érosion hydrique.
• Le couvert végétal réduit l’impact de la pluie sur le sol nu, diminuant ainsi le ruissellement de surface.
• La matière organique issue des végétaux enrichit le sol, renforçant sa structure et sa capacité à retenir l’eau.

De telles synergies entre les espèces végétales permettent de créer des microclimats propices à la biodiversité, tout en augmentant la résilience des systèmes agricoles face aux aléas climatiques.

Les techniques agroforestières innovantes pour prévenir l’érosion en pente

Plusieurs pratiques agroforestières se sont révélées particulièrement efficaces lorsqu’elles sont adaptées aux terrains en pente. Voici les plus pertinentes pour les agriculteurs désireux de lutter contre l’érosion des sols.

Les haies vives en courbes de niveau

Installer des haies vives selon les courbes de niveau du terrain est l’une des pratiques les plus efficaces pour réduire l’érosion en contexte montagneux ou vallonné. Ces haies, constituées d’espèces ligneuses comme le Leucaena leucocephala, le Gliricidia sepium ou le Vetiver, agissent comme des barrières naturelles.

• Leur disposition en lignes parallèles aux courbes de niveau freine la descente de l’eau.
• Elles capturent les sédiments et favorisent l’infiltration dans le sol.
• En plus de leur rôle anti-érosif, elles peuvent fournir du bois, du fourrage ou des produits transformables (miel, fruits, etc.).

Les bandes enherbées et les cultures en terrasses

Les bandes enherbées, placées à intervalle régulier sur la pente, agissent comme des coussins végétaux absorbant l’impact des gouttes de pluie. Elles diminuent le ruissellement et favorisent la rétention des éléments nutritifs. Très souvent, elles sont associées à des cultures en terrasses, qui sont particulièrement adaptées aux pentes raides.

La conception de terrasses peut varier :

• Terrasses bench : nivelées et retenues par des ouvrages en pierre ou en bois.
• Terrasses vivantes : formées à l’aide de haies ou de cultures permanentes disposées selon le relief.

Ces systèmes combinés permettent de maximiser la surface cultivable tout en sécurisant le sol contre le ravinement.

Les systèmes sylvopastoraux intégrés

Les terrains pentus sont souvent marginalisés ou voués à la pâture extensive. Or, l’agroforesterie propose aussi des solutions à travers des systèmes sylvopastoraux intégrés. Il s’agit ici d’associer arbres fourragers, herbacées et pâturages pour créer un couvert végétal permanent, éviter le surpâturage et renforcer la structure du sol.

Les bénéfices principaux sont :

• Un moindre tassement du sol grâce à une gestion adaptée du bétail.
• Des apports organiques réguliers via les fèces et les résidus végétaux.
• Une réduction de l’évaporation grâce à l’ombrage des arbres.

L’importance de la sélection des espèces végétales en agroforesterie

Chaque terrain a ses spécificités écologiques (sol, climat, exposition). Il est donc primordial de choisir des espèces végétales bien adaptées au contexte local. Les arbres à enracinement profond, à croissance rapide et au feuillage dense sont privilégiés.

Parmi les espèces recommandées :

• Grevillea robusta : pour l’agroforesterie caféière en altitude.
• Cajanus cajan (pois d’Angole) : pour son rôle fertilisant et ses racines structurantes.
• Calliandra calothyrsus : forage, biomasse et couverture végétale rapide.

Le choix stratégique des espèces optimise les interactions positives et maximise les bénéfices écosystémiques sur le long terme.

L’intégration des savoirs locaux dans les projets agroforestiers en pente

Pour qu’un projet d’agroforesterie soit véritablement durable, il doit être porté par les acteurs locaux. En zones de montagne ou de collines, les communautés rurales possèdent souvent des connaissances empiriques sur la dynamique des sols, les cycles hydriques et les espèces endémiques. Intégrer ces savoirs avec les approches scientifiques modernes permet d’accroître l’adhésion des agriculteurs et d’assurer la viabilité des projets agroécologiques à moyen et long terme.

Les projets participatifs, impliquant coopératives agricoles ou associations paysannes, sont souvent les plus réussis. Ils favorisent la co-conception des systèmes, le partage des responsabilités et l’appropriation des pratiques.

Les bénéfices environnementaux et économiques de l’agroforesterie en pente

Au-delà de la lutte contre l’érosion, les pratiques agroforestières offrent une multitude d’avantages :

• Amélioration de la structure du sol et augmentation de la matière organique.
• Captation du carbone atmosphérique et lutte contre le changement climatique.
• Diversification des revenus grâce à la vente de fruits, bois, fourrage ou plantules.
• Amélioration de la biodiversité fonctionnelle (pollinisateurs, auxiliaires, etc.).

Ces services écosystémiques, encore trop peu valorisés, représentent pourtant un levier stratégique pour la transition agroécologique des zones sensibles à l’érosion.

Se former et s’équiper pour réussir son projet agroforestier en terrain pentu

Mettre en place un système agroforestier efficace nécessite une certaine technicité. Des formations existent, en présentiel ou à distance, pour accompagner les agriculteurs dans l’adoption de ces nouvelles pratiques. Il est aussi recommandé de s’équiper d’outils adaptés, notamment pour la cartographie de pente, la mesure du ruissellement et la préparation du sol (houes, semoirs manuels, équipements de paillage, etc.).

Certaines coopératives écologiques ou pépinières spécialisées proposent également des kits de plantation adaptés aux terrains escarpés, favorisant une mise en œuvre rapide et simplifiée de l’agroforesterie.

En alliant innovation, respect des savoirs traditionnels et rationalité agronomique, l’agroforesterie sur terrain pentu s’impose comme une stratégie puissante pour lutter contre l’érosion tout en redynamisant les territoires ruraux.